Arrivée au lycée [Terminé]

Oxana Aleksandrovitch descendit du bus, traînant derrière elle une valise à roulette.
Ce matin, à 7 heures, elle avait pris l’avion à Okhotsk et était arrivé à Osaka vers 10 heures. Elle avait ensuite pris le bus pour le centre-ville, puis un autre bus pour le lycée Sousaku.
Oxana détestait sa grand-mère. Babouchka l’avait forcée à venir ici, dans un pays étranger, et, pire que tout: dans un lycée ou tout le monde la regarderait de travers, elle, la fille xénophobe. Bien sûr, comme l’avait dit sa grand-mère, personne ne la connaissait là-bas, et donc, si elle se comportait bien, personne ne saurait qu’elle avait un problème avec les autres. Malgré tout, Oxana ne supportait pas l’idée de se retrouver à étudier dans un lycée avec les loups-garou, des anges, des humains et des démons comme camarades. Elle avait tenté de dissuader Babouchka de l’inscrire. Malheureusement, sa grand-mère était aussi têtue qu’elle, voire plus. Oxana avait donc fini par céder. Et malgré son mécontentement, elle n’en voulait pas à Babouchka. Elle l’aimait trop pour ça.
Oxana avançait dans le couloir du lycée menant aux dortoirs. Tout était calme, tous les élèves n’étaient pas encore rentrés de vacances. Mais d’ici quelques jours, ces couloirs grouilleraient de monde, d’élèves se rendant en classe, de professeur en direction de la salle des profs, de gens allant à la cafétéria...
Oxana trouva les dortoirs et se mit en quête de sa chambre. Quand elle la trouva, elle ouvrit la porte avec la clé qu’elle avait reçue et entra. La pièce était bien éclairée, les fenêtres donnaient sur l’arrière du bâtiment. Devant elles se trouvait un bureau en bois. Une étagères à livres était placée à côté du lit, en face duquel se trouvait, contre le mur opposé, une petite armoire à vêtements.
Oxana abandonna sa valise aux pieds de son nouveau bureau et balaya la pièce du regard. Cette chambre avait l’air confortable, c’était déjà ça.
Avec un soupir de fatigue, la jeune fille enleva son pull; ici, il faisait plus chaud qu'en Russie. Puis elle se laissa tomber sur son lit et ferma les yeux.

Ça faisait trois jours qu'il était là... Trois jours, et il n'avait presque pas vu d'élèves. Et ceux qu'il avait aperçu passaient en coup de vent, aussi rapide que l'éclair. C'est vrai qu'il y avait du travail. En général, les jeunes qui arrivent avant les cours, c'était soit pour vraiment prendre le temps de s'installer, ou alors parce qu'ils venaient donnés des coups de mains au personnel. Ce que Dai' était venu faire, d'ailleurs. Aider. Et fuir ces deux imbéciles qui l'hébergeaient avant, aussi. A ce propos, le jeune ange avait trouvé le concierge fort sympathique. D'accord, dès qu'il le voyait il lui donnait du travail, mais toujours avec le sourire. C'est sûrement aussi pour ça que Kazuru aimait l'aider.
Et là, maintenant, il devait arpenter les couloirs à la recherche des chambres qui n'avaient pas encore la chance d'avoir de housse pour les coussins. Une pile considérable de linges blancs dans les bras, le lycéen avait de la peine à se balader. Le point positif, c'était que le tas régressait à vu d'œil, étant donné que c'était vite fait et facile. Ce qui lui laissait pleinement le temps de se demander ce que sa famille pouvait bien faire, là, maintenant, en Écosse... C'était une question qu'il se posait souvent, un peu trop souvent même.
Ça faisait presque deux ans qu'il ne les avait pas vu. Qu'il n'avait pas eu de nouvelles.
Probablement parce que lui et son père avaient tous deux trop de fierté pour oser demander quelque chose de l'autre...

Allez, il fallait qu'il arrête de penser à eux, maintenant il allait amener sa dernière housse... Et après il pourrait enfin prendre un peu sa journée, et s'en aller profiter de la ville. Il avait déjà repérer une partie des endroits dans lesquels il serait souvent, mais une ville est une ville, quand il y en a plus, y en a encore.
Joyeux, comme à son habitude, Kazuru ouvrit la porte de la chambre 14, la dernière dans laquelle il manquait ce précieux linge blanc. Sans toquer, puisqu'il croyait que "Oxana", dont le prénom était inscrit sur la porte, n'était pas encore arrivée.
Erreur.
Évidemment qu'elle était là, puisqu'il n'avait pas eu à ouvrir la porte à clé. Il tomba nez-à-nez sur une jeune fille, allongée sur son lit, les yeux fermés. Encore fermés. Il ouvrait les portes trop doucement, visiblement. La valise de la demoiselle, pas encore ouverte, avait été abandonnée au pied du bureau en face de la porte, donc en face de Dai'...

- Euh.. Salut, je viens changer le coussin =D... glissa-t-il, au cas ou elle ne dormait pas, fermant la porte derrière lui...

- Euh.. Salut, je viens changer le coussin =D...
Oxana ouvrit brusquement les yeux et se releva. Elle vit avec stupeur un jeune homme aux cheveux plus que flamboyants, qui la regardait avec un grand sourire... angélique. Elle n’avait pas compris ce qu’il lui avait dit, étant donné qu’elle était en train de s’endormir, par contre, elle l’avait entendu et il faut dire qu‘il l’avait surprise. Elle s’écria froidement:
-Chto vy zdes’ delaete??*
Sous le coup de la surprise, elle avait parlé en russe. Le garçon n’avait sans doute rien compris. Tant pis. Oxana s’approcha du jeune homme et lui lança un regard méfiant. Elle s’aperçu alors qu’il tenait un linge blanc et comprit le motif de sa venue. Elle parla alors, en japonais cette fois-ci, sans le moindre accent russe:
-Oh, le coussin. Pardon, je croyais que tu étais venu m’espionner.
Oxana croisa les bras, s’appuya dos au mur et lança sans la moindre sympathie:
-Vas-y, je t’en prie, fais ton boulot.
La jeune fille observa le garçon de ses yeux aujourd’hui noirs. Il devait avoir entre 17 et 18 ans. Pourtant, il ne devait pas être un élève s’il faisait ce boulot... Oxana ne songea même pas à lui poser la question.
Quant à sa race, il était clair que ce n’était pas un vampire. Peut’ être était-ce un humain... De toute façon, elle s’en fichait. Qu’il change ce coussin et qu’il s’en aille au plus vite.

(*Qu'est-ce que vous faites ici??)

La jeune fille se redressa d'un coup, aussi surprise que si un mammouth venait de lui avouer son amour... D'accord, l'image n'était peut-être pas très poétique, mais elle était réaliste. Les yeux écarquillés, elle prononça des paroles totalement incompréhensibles pour le jeune homme... Soit la surprise lui faisait perdre ses mots, soit elle s'exprimait dans une autre langue. Que ce soit l'un ou l'autre n'avait pas beaucoup d'importance, puisque ça ne l'aiderait pas à comprendre ce qu'elle avait voulu dire.
En tout cas, Oxana avait parlé d'un ton froid et distant, et lançait à présent un regard glacial sur le jeune ange. Visiblement, elle n'avait pas besoin de connaître quelqu'un pour ne pas l'aimer. Le contraire de lui, enfaite. Elle laissa son regard sombre passer sur le linge que tenait Daidaiiro, comprenant alors que non, il n'était pas venu l'assassinée ou l'espionner, ou il ne savait quelles autres idées elle avait eu. Bon. L'ange ne savait pas son histoire, il ne savait pas ce qu'elle avait vécu pour penser ça en voyant un jeune homme dans sa chambre.
S'appuyant contre un mur avec nonchalance, elle attendit, insistante, après lui avoir "ordonné" de faire son boulot.

- A vos ordres, madame... ^^ lança-t-il sans montrer la moindre perturbation, sans se laisser démonter. Il s'avança vers le lit.

Ça c'était pas une fille, du moins pas une vraie. Elle était plutôt petite, très jolie, de magnifique cheveux noirs jais jusqu'aux reins. Un corps svelte et bien fait, accompagné d'une peau au tient blafard, faisant ressortir ses grands yeux noirs.
En clair, elle était superbe. Physiquement. Parce que son comportement tenait plus du yankee que de la jeune lycéenne. Avant, quand il avait croisé une jeune fille dans le couloir, venue aider le jardinier, celle-ci lui avait adressé un sourire plein de charme. Elle, c'était une fille.
Enfin, chacun sa vision des choses.
Alors qu'il changeait la housse, il se permit de demander, joyeusement :

- Tu viens d'où, pour arriver maintenant ? Quand je suis passé ce matin, il n'y avait encore personne dans cette chambre.

Le jeune homme ne sembla pas trop intimidé par le ton glacial d'Oxana. Il s’avança en souriant vers le lit pour changer la housse du coussin.
Le garçon portait des vêtements très colorés, qui allaient à merveille avec sa bonne humeur. Il paraissait évident qu’il n’était pas japonais, vu ses cheveux roux et ses taches de rousseur. Si Oxana avait été une jeune fille comme les autres, elle l’aurait sûrement trouvé séduisant et drôle.
Le jeune homme lui demanda alors, tout en « travaillant », d’ou elle venait pour arriver aujourd’hui.
Oxana n’était pas très douée pour le dialogue, et il allait rapidement s’en rendre compte, car elle lui répondit simplement:
-De Okhotsk, en Russie.
Le silence se fit alors dans la chambre. Oxana se rendit compte qu’elle n’était pas très bavarde, mais elle ne trouvait rien d’intelligent à dire et elle se fichait de savoir d’ou venait le jeune homme.
Quand il eut terminé de mettre la housse, elle s’approcha de lui et ne pu s’empêcher de dire sarcastiquement:
-Ils doivent te payer cher pour tout le boulot que tu fais.
C’était méchant, elle le savait. Les mots étaient sortis tout seuls, elle n’avait pas réfléchi. Mais pas question de s’excuser. S’il était si joyeux que ça, il n’allait pas le prendre mal. Au pire, ça lui fera juste un ennemi dès le premier jour...

La demoiselle venait de Russie, plus précisément de... Ah, il ne se souvenait même plus du nom, un truc typique russe, le genre dont il n'arriverait jamais à se souvenir. Russe hein ? Pourquoi venait-elle au Japon, dans ce cas ? C'était pas le pays le plus proche, et qui plus est, le russe et le japonais étaient deux langues incroyablement différentes.
Il se rendit compte que son raisonnement ne tenait pas la route, puisque lui il était là. Un écossais qui parle anglais et se retrouve au Japon, c'était aussi logique qu'une russe qui parle russe se retrouve... au Japon.
Eh puis, cette "fille" n'avait pas l'air d'aimer parler, bien au contraire. Elle était froide et nonchalante, elle lui répondait comme s'il était le valet de chambre qui ne faisait que passer. Ça ne le vexait pas, pas du tout, il trouvait juste dommage. Il aurait bien aimer être ami avec elle. Bon, ok, il voulait toujours être ami avec tout le monde, mais cette demoiselle ne faisait pas exception à la règle.
Elle ne partageait pas son point de vue, c'était tout. C'était aussi simple que ça.

Une fois la raison de sa venue terminée, il se redressa. Oxana s'approcha de lui, à sa plus grande surprise, et cette fois elle ne répondit pas à une de ses questions. Elle prononça quelques mots d'elle-même, bien qu'ils ne soient pas sympathiques du tout.

-Ils doivent te payer cher pour tout le boulot que tu fais.

Elle se moquait de lui, en somme. Mais ça ne le gênait pas, il trouvait même cette remarque plutôt amusante. Alors, d'un sourire radieux et d'une voix toujours joyeuse, il lui répondit :

- Et encore, ils savent pas ce que je fais de cet argent xD... Sinon, tu veux de l'aide, pour t'installer ?

Ça proposition lui avait échappé. Question d'habitude, probablement... Bah, de toute façon, si elle devait déjà le prendre pour un fou ou un pervers, vu la façon dont elle s'était réveillée. Ça n'allait pas changé grand chose...

- Et encore, ils savent pas ce que je fais de cet argent xD... Sinon, tu veux de l'aide, pour t'installer ?
Oxana dû bien reconnaître qu'elle ne s'y attendait pas. Pas du tout. Elle regarda le jeune homme comme si il avait pris un coup sur la tête. C’était pas normal qu’il réagisse comme ça... Néanmoins elle répondit de sa voix naturellement distante, sans pour autant qu’elle soit désagréable cette fois-ci:
-Bah, oui... Pourquoi pas?
En réalité, elle avait accepté parce que malgré tout, elle s’en voulait d’avoir été un peu méchante avec lui. Il avait l’air gentil, c’eut été dommage de lui faire de la peine. Et ça avait l’air de lui faire plaisir, de l’aider. Tant qu’à faire...
-Mais t’as pas intérêt à toucher à tout! C’est moi qui te dis ou tu dois mettre quoi.
Son ton était ferme, le garçon avait sûrement compris. De toute façon, s’il faisait ne serait-ce qu’un truc de travers, elle le mettrait dehors, un point c’est tout.
Oxana prit sa valise, l’ouvris sur son lit et tendit ses livres (de tout genres) à... comment il s’appelait en fait? Bah, c’était pas très important.
-Tu peux poser ces bouquins sur l’étagère.
Quand à elle, elle prit une pile de vêtements et les rangea dans son armoire, espérant qu’il allait pas fouiller dans ses affaires ni la traiter d’intello en voyant tous les livres qu’elle avait emportés...

Ouhla. C'était quoi ce regard ?... Elle avait l'air de le prendre pour un idiot, pour un vrai, cette fois. Il s'attendait déjà à quitter la pièce, quand elle accepta son aide. Attendez. Quoi ? Elle acceptait ? Voilà une réponse inattendue, qui ne manqua pas de faire plaisir au jeune homme. Naturellement, il y avait une condition pour qu'il ait vraiment le droit de faire quelque chose de ses mains pour Oxana : l'ange ne devait toucher qu'a ce qu'elle lui disait de toucher. Aucun problème !
Il hocha la tête, joyeusement comme à son habitude, quand elle prit la valise pour l'ouvrir sur son lit. Elle sorti un grand tas de livre... Romans policiers, thrillers, manga, romans à l'eau de rose... Il y avait absolument tous les genres de livres qui pouvaient exister dans ce tas, qu'elle lui tendit. Direction l'étagère, exécution, soldat. Il n'empêche que Kazuru était bouche bée de penser qu'on pouvait lire autant, ou qu'on pouvait emporter tant de livres avec soit. A croire qu'elle préférait passer ses soirées avec les lettres qu'avec les amis. Dommage. A noter que ce n'était peut-être pas vrai, ou qu'avec de la chance, il arriverait à la sortir, une fois. Dans longtemps, certes, mais une fois peut-être.
Alors qu'il rangeait soigneusement les livres sur leur trône d'étagère, il jeta un coup d'œil à la jeune fille. Elle prenait une pile de vêtements, avec l'intention de les ranger, elle aussi. La plupart étaient noirs ou foncés. Il guettait en espérant apercevoir un vêtement de soirée, quelque chose de vraiment classe... Mais sa prière n'atteint personne, il n'en vit pas. Allez, soyons optimiste, il l'avait sûrement loupé. Un silence remplissant la pièce, alors que tous les deux remplissent leur devoir respectif, Dai' se permit de placer une question :

- Comment tu peux trouver le temps de lire tout ça dans une seule vie ? Je parie qu'il y a plus de 24h dans tes journées...

Le pire, c'était qu'il se posait vraiment cette question... Non pas qu'elle ait plus de 24h dans une journée, mais qu'il faille plus d'une vie pour parvenir à finir tous les livres qu'elle avait emporté...

Personne ne disait rien. Oxana se pencha sur sa valise, en sortit une deuxième pile de vêtements et la rangea. La présence de ce jeune homme ne la dérangeait pas tant que ça finalement. Tout comme le silence qui s’était installé ne la mettait pas mal à l’aise. Visiblement, le garçon n’était pas du même avis: il demanda à Oxana comment elle pouvait lire tous ces livres dans une seule vie.
Oxana ne répondit pas. Voilà, elle en était sûre, il avait fait une réflexion sur ses livres. Toutefois, elle ne savait pas trop comment l’interpréter: était-ce moqueur ou tout simplement pour détendre l’atmosphère? Bien sûr, la réponse était claire: comment ce type aussi joyeux pouvait se moquer d’elle? Il disait ça pour plaisanter, rien de plus... Mais comment lui expliquer que si elle lisait autant, c’était parce qu’elle n’avait tout simplement pas d’autre chose à faire et que c’était la seule occupation qui lui plaisait? De plus, elle était certaine qu’il se fichait pas mal de la réponse qu’elle allait donner. Elle dit alors indifféremment, dans un haussement d’épaules:

-J’ai toujours aimé lire. Depuis toute petite.

La jeune fille hésita et leva les yeux sur le garçon. Comme il la regardait aussi, Oxana détourna le regard, rageuse contre elle même. Elle était en train de faire ami-ami avec un garçon qu’elle ne connaissait ni d’Ève ni d’Adam et qui plus est, n’était même pas un vampire. Elle prit une dernière pile d’habits et ajouta, d’un ton plus froid:

-De toutes façons, qu’est-ce que ça peut bien te faire?

La demoiselle mit un petit moment à répondre... A croire que les paroles, pourtant bien innocentes, de Kazuru ne lui avaient pas plus le moins du monde. Elles l'avaient même plutôt énervée. Il avait fait une gaffe, dans l'intimité de la princesse d'une forteresse de granite. Il venait de déclarer la guerre à un bataillon tout entier d'insultes et de préjugés, alors que lui était bien seul de son côté.
Le truc, s'était que Daidaiiro ne battait jamais en retraite, foi d'idiot.

-J’ai toujours aimé lire. Depuis toute petite.finit-elle par avouer en haussant les épaules, continuant de ranger ses affaires. Elle venait de lui faire part d'une petite partie d'elle, probablement infime, mais une partie quand même. Le bataillon perdait de sa force, mais la victoire était loin d'être proche.

Alors qu'il hochait la tête, ne sachant pas comme réagir sur cette phrase bien stérile de réponse, Oxana tenta ce qui aurait pu être interprété comme un approche : elle leva timidement les yeux vers le roux. Manque de chance, celui-ci avait eu la même idée. Et que leur regards se croisent ne lui plus pas, mais pas du tout. A elle, donc. Elle baissa les yeux, presque rageusement. Qu'avait-il encore fait, mis à part sentir que le bataillon chargeait à nouveau ?
La jeune russe prit une nouvelle pile de vêtements entre ses mains (délicates, soit dites en passant, mais nous ferons comme si je ne l'avais jamais dit), et envoya sa première ligne au front...
Elle lui demanda ce que ça pouvait bien lui faire, en quoi est-ce que ses histoires pouvaient bien l'intéresser. Elle n'était pas contente, et semblait bien énervée. Daidaiiro continuait son bric-à-brac. Après tout c'était bien pour ça qu'il était encore là, même si en réalité il réfléchissait à sa réponse. Comment expliquer à quelqu'un d'aussi peu ouvert qu'on aime bien prendre contact, d'une manière ou d'une autre, avec ceux qui nous entourent ? Oui, ça semblait compliqué. Mais sa première ligne à lui était prête, et lançait à son tour l'assaut.

- Bah... Ça m'intéresse, c'est tout... C'était pas une critique, tu sais, faut pas le prendre mal. Moi j'ai toujours de la peine à trouver du temps pour mes devoirs, alors lire un livre xD.
Il parlait d'une voix tendre, chaude, le contraire de la voix que la jeune fille venait d'utiliser "contre lui".

Le jeune homme était vraiment incroyable. Oxana lui avait répondu méchamment, mais il ne semblait pas s'en soucier. Au contraire, il continuait à lui parler avec le sourire, lui assurant que ce qu’elle avait à dire l’intéressait. Il avait l’air de vouloir devenir ami avec la jeune fille, c’était plutôt bizarre. Quand il lui dit qu’elle ne devait pas prendre mal ses remarques, Oxana se senti un peu gênée: c’est vrai, pourquoi prenait-elle toujours mal les choses venant des autres? Puis il plaisanta sur ses devoirs. Donc, il ne devait pas travailler ici. S’il avait des devoirs, c’est qu’il faisait des études...
Oxana prit dans sa valise quelques cahiers et ses stylos qu’elle posa en tas sur son bureau. Le jeune homme voulait sans doute qu’elle dise quelque chose, il devait attendre une remarque de sa part... Oxana se retourna et regarda le jeune homme sans détourner le regard cette fois-ci et demanda d’une voix nonchalante:

-Tu étudies dans ce lycée?

Voilà, elle lui avait posé une question... Mais que faisait-elle, là? C’était pas du tout dans ses habitudes de parler avec le premier venu. Mais ce garçon avait un contact si facile... Et, elle devait bien l’admettre, il avait un sourire qui mettait immédiatement en confiance. Ce qui mettait plutôt mal à l’aise la jeune russe, qui ne faisait normalement confiance qu’à elle-même... Décidément, ce jeune homme était vraiment spécial. Vivement qu’elle se retrouve un peu seule pour s’y retrouver.

-Tu étudies dans ce lycée ?

He ? C'était une question ça ? Enfin, oui, c'était bien une question, mais c'était elle qui l'avait posée... D'elle-même, bien que ces mots n'aient pas été prononcer très gentiment. Pas du tout gentiment, enfaite. Sauf que de ça part, le renard en avait vu d'autres. Il se permit d'aligner le dernier livre avant de répondre, se retournant avec un petit air satisfait. Kazuru en avait finit avec les bouquins, il n'aurait plus qu'à attendre les instructions suivantes. Sauf que lorsqu'il se retourna, il fut surpris de tomber face à face avec la jeune fille, qui le fixait dans les yeux. Là, non, il ne s'y attendait pas. Mais montra le moins du monde sa surprise, répondant chaleureusement :

- Ouais, en deuxième année... J'aide de temps en temps le concierge, même si ça rapporte pas beaucoup. Et toi, tu es en... première ?

Ça lui faisait un peu bizarre, d'avoir ces yeux noirs et froids plantés dans les siens, colorés et amicaux. Naturellement, c'était pas la première fois qu'il se retrouvait en face de ce qui aurait pu être comparé à un mur, excepté que d'habitude, c'était des gars, par de jolies filles. Non pas que cela lui déplaise, pas particulièrement, c'était simplement qu'il adorait discuter avec des lycéennes pleines de vie et craquantes. Mais c'était un détail, un tout petit détail.
Daidaiiro remarqua que l'atmosphère avait bien changé, en quelques minutes. En arrivant, il avait senti cet air lourd et ces silence pesant, alors qu'a présent, tout était plus tranquille, plus calme. Les silences plus courts, l'air plus léger. Ça lui faisait plaisir de penser ça. Il avait l'impression qu'une fois s'être plongé dans un lac glacial, il avait un peu réussit à le réchauffer. Et, si une fois la température se fait encore meilleure, peut-être qu'il parviendra à inviter des amis à partager la baignade, qui sait ?

Le rouquin mit un certain temps avant de répondre à la jeune fille. Enfin il se retourna et avoua avec son éternel sourire qu’il était en deuxième année de lycée. Puis à son tour, il demanda à Oxana si celle-ci était en première. C'était exactement ça, quelle perspicacité. Elle lui répondit sans baisser les yeux, de manière très courte, comme à son habitude:

-Oui, en première.

Oxana se demanda ou cette discussion allait les mener. De toute façon, elle était certaine qu’une fois sorti de cette chambre, le rouquin allait s’en aller retrouver ses copains et oublier tout ce qu’elle lui avait dit (en même temps, elle lui avait pas dit grand chose... ). En tout cas, elle c’est ce qu’elle ferait face à une antisociale comme elle...
Elle remarqua alors que le jeune homme avait terminé d’aligner les livres sur la bibliothèque. Elle s’approcha de sa valise, regardant ce qu’elle pourrait lui donner à ranger. Il restait son appareil photo, son ordinateur portable, ses patins à glace (elle -même se demandait pourquoi elle les avait emmenés), sa trousse de toilette et quelques autres babioles sans grande importance. La russe se retourna vers le jeune homme et lui dit nonchalamment:

-Ben écoute, j’ai plus rien à te faire ranger. C’était sympa de m’avoir aidée...

Là, elle bloquait. Que devait-elle faire à présent? Continuer de ranger le reste de ses affaires et attendre que le rouquin s’en aille de lui-même ou lui faire comprendre qu’il devait s’en aller? Comme elle ne savait pas comment réagir, elle ne bougea pas, attendant de voir ce qu’il allait dire. N’oubliez pas que dans le domaine de la communication, Oxana n’était douée que pour l’agressivité.

"Oui, en première." Daidaiiro répétait cette phrase dans sa tête, tout en attendant la prochaine mission que la jeune fille lui confierait. Si elle lui en confiait une. Enfin, revenons à nos moutons (Méééé <3). Alors que ces trois mots tournaient en boucle, comme des manèges ne s'arrêtant pas, pour le plus grand bonheur des jeunes enfants en folie, l'ange remarqua quelque chose. Il adorait ces "Oui", ceux que la demoiselle au cœur de glace laissait échapper de ses lèvres si souvent fermées. Bon, d'accord, il aimait beaucoup les "oui" en général, mais il avait une particulière affection pour ceux-là.
Ils étaient froids, sombres, étonnement tristes et rares, mais ils étaient semblables à des pâtisseries hors de prix qu'on ne s'offre qu'à des occasions bien peu courantes. C'était sa façon d'apprécier ces mots, ce mot, celui qu'il espérait entendre plus souvent à l'avenir, si avenir il y avait...

Ce qui n'avait pas l'air de vouloir pointer le bout de son nez. Oxana, bien embêtée, fouilla dans sa valise, probablement à la recherche de nouvel ordre à donner. Le jeune homme, bien curieux, jeta lui aussi un coup d'œil aux affaires de la jeune russe. Il vit passer un ordinateur portable, des patins à glace, et un appareil photo... Elle faisait donc des photos ? Comme lui ? Étonnant, imprévisible même. S'ils se revoyaient, ils en reparleraient, et peut-être qu'ils se découvriraient des points communs ?! Certes, les faux-espoirs peuvent être mauvais pour la santé, mais si c'était vraiment le cas, Kazuru n'aurait, à cette heure-ci, plus de santé du tout. Il est un grand connaisseur, en la matière. Quoi qu'en réalité, il n'attendait, en général, pas grand chose des autres.

-Ben écoute, j’ai plus rien à te faire ranger. C’était sympa de m’avoir aidée...

Ah... alors voilà, il n'avait plus rien à faire ? C'était fini, ils s'étaient connus une demi-heure, et maintenant, ils allaient à nouveau être des inconnus ?
Bon, ok. Si ça lui allait à elle, ça lui allait à lui aussi. Daidaiiro était certes un peu début, mais on ne peut pas être ami avec tout le monde. C'était une réalité. Une dure réalité, à laquelle il était confronté, quelques fois. Mais là, le jeune homme comprenait bien qu'elle ne voulait pas qu'il reste. Qu'il devait s'en aller, de lui-même, sinon elle le chasserait...

- Ah okay. Bon ben, Bye alors, à la prochaine, peut-être ^^... dit-il assez rapidement, toujours avec un petit sourire prometteur. Il était déçu, mais ne le montrait pas. Agressive comme elle était, allez savoir ce qu'elle aurait fait.

Il se retourna, fit quelques pas en direction de la porte. Tant pis, il lancerait son armée en une fois, foncerait tête baissée. Il en mourrait d'envie, il était impatiemment curieux de savoir quelle serait sa réaction, bien qu'elle soit plutôt prévisible. Il se re-retourna, demanda en passant une main dans ses cheveux de renard :

- Il y a une petite fête, organisée à la Disco... Tu veux y aller avec moi ? Il y aura pas beaucoup de monde...

Amen, et advienne que pourra.

Le jeune homme eu l’air déçu, mais cela ne dura qu’une seconde. Immédiatement, son sourire plein de charme reprit place sur son visage et il s’empressa de dire au revoir à la jeune russe, avec un semblant de promesse de se revoir une prochaine fois.
Oxana ne dit rien et regarda le renard s’éloigner en direction de la porte. C‘était bien qu’il parte, elle allait pouvoir finir de ranger ses affaires tranquillement, appeler sa grand-mère pour lui dire qu’elle était bien arrivée... Quand tout à coup, il se retourna, passant une main stressée dans ses cheveux:

- Il y a une petite fête, organisée à la Disco... Tu veux y aller avec moi ? Il y aura pas beaucoup de monde...

Oxana ouvrit de grands yeux étonnés. Le renard l’invitait à aller danser, une demi-heure après leur rencontre! Mais le plus spécial, c’est qu’il lui avait demandé à elle alors que, franchement, elle ne s’était pas super bien comportée avec lui... En plus, il avait bien précisé qu'il n'y aurait pas beaucoup de monde, il s'était donc rendu compte qu'elle n'aimait pas tellement les gens. Pourtant, il avait quand même demandé. Mais dans quel but?
Décidément, elle ne s’y attendait pas, mais alors pas du tout. Elle croisa les bras après s’être replacé une mèche rebelle derrière son oreille. Elle avait tout fait pour masquer sa surprise, et gardait son regard froid. Pourtant elle ne pu s'empêcher de sourire légèrement, pour la première fois depuis son arrivée au Japon. Elle dit à l’intention du jeune homme:

-Attends, tu veux dire que tu m’invites à aller danser? Alors que tu ne connais même pas mon nom?

Il avait vu un petit sourire se dessiner sur les lèvres d'Oxana. Elle avait sourit. Un peu, peut-être, mais sourit quand même. Jamais un sourire ne lui avait autant fait plaisir.
Enfin, c'était peut-être un peu exagéré. Un peu beaucoup. En fait, il était juste content qu'elle ne lui ait rien envoyé au visage... Ouais, c'était plutôt. Le renard préférait un sourire qu'un objet dans le visage.
"Ne lui avait jamais autant fait plaisir"... Fallait pas pousser, non plus.

-Attends, tu veux dire que tu m’invites à aller danser? Alors que tu ne connais même pas mon nom?

Euh... Il avait un peu l'habitude d'inviter tout le monde, à vrai dire. Bien que si elle venait, il serait resté avec elle tout le long de la soirée (sauf si la jeune russe aurait souhaité son départ, là, il n'aurait pas fait long feu...). Quoi qu'il en soit, Daidaiiro ne savait pas si s'était l'Écosse qui était très chatoyante, la Russie très froide, ou lui un peu précipité, mais la jeune demoiselle ne semblait pas très emballée par la proposition du jeune roux.
Il fallait répondre, maintenant, plus le temps de rêvasser...

- Ben... Je sais ton prénom, c'était écrit sur la porte ^^'... Oxana, hein ? Moi c'est Daidaiiro Kazuru... Mais tu peux m'appeler comme tu veux ! ... Et si tu ne veux pas venir, dis-le tout de suite, c'est pas bien grave ^^. ajouta-t-il. Il ne voulait pas qu'elle se sente forcée ou quoi que ce soit, qu'elle vienne si elle le voulait, c'était tout ce qui comptait.

Il s'attendait à un "NON" glacial, ou a quelque chose du genre... Après tout, c'était vrai, ils ne se "connaissait" que depuis quelques dizaines de minutes...
Bien que lui serait allé sans la moindre hésitations, il fallait respecter et comprendre ce qui différencie chacun...

Le pauvre. Il avait plutôt l'air mal à l'aise à présent (si il est possible que ce jeune homme soit mal à l'aise...). Il répondit précipitamment à la jeune russe, que oui, il connaissait son prénom, celui-ci étant inscrit sur sa porte. Ensuite, il se présenta: Daidaiiro Kazuru.

-Et si tu ne veux pas venir, dis-le tout de suite, c'est pas bien grave ^^.

Oxana ne savait pas quoi répondre. Au fond, elle ne voulait pas aller à cette fête. Pas du tout. Mais d’un côté, Daidaiiro s’était montré tellement sympa avec elle, qu’elle ne voulait pas lui faire de peine en lui disant qu’elle ne voulait pas y aller.
Elle réfléchit, ne sachant vraiment pas quoi faire. C’était une des rares fois ou elle aurait voulu se montrer gentille avec quelqu’un en lui faisant plaisir... Mais elle ne le connaissait pas! Un peu plus d’une demi heure ensemble, c’est peu. D’un autre côté, elle apprendrait peut-être à mieux le connaître si elle allait à cette fête.
Mais avait-elle envie de le connaître? Elle-même n’en savait rien.
Et Daidaiiro attendait une réponse. Maintenant. Oxana finit par lâcher, avec un petit soupire:

-Ben... Je sais pas trop...

La vampire leva les yeux sur le jeune homme. C’était fou comme il pouvait avoir cet air joyeux tout le temps. Elle s’imaginait mal lui arracher son sourire en lui annonçant qu’elle n’irait pas...

-Bon, d’accord, je viens. Mais pas longtemps. Juste une heure ou deux, pas plus, je n’aime pas trop les fêtes.

Elle s’était montrée plutôt claire, sa voix timbrée de son habituel ton aussi froid que les hivers de Russie. Toutefois, elle ajouta plus gentiment:

-Tu passes me prendre?

Un petit silence plana dans la pièce. Il n'était pas pesant, mais Daidaiiro aurait bien voulu s'en passer. Il n'aimait pas le silence, il préférait le bruit, la vie, la joie. Un vrai feux d'artifices, une symphonie de couleur et de chaleur, ce garçon. Le tableau était assez intéressant, presque incroyable.
D'un côté de la peinture, du gris, du blanc, du noir. Le froid Russe, la neige entachée de gouttes de douleur gelées, préservées dans la glace comme un fossile. De l'autre côté, de l'orange, du rouge, du jaune. La chaleur de la jeunesse, des gouttes de douleur enflammées, vivantes, reniées par le sourire, comme des larmes d'huiles qui auraient prit feu. Ce tableau semblait abstrait, irréel. Surtout lorsqu'il s'agissait de deux lycéens, deux adolescents en mal de vivre et si différents.
La Reine des Glaces & le Roi du Soleil, réunit dans la même pièce, pour un grand tour de manège.

-Bon, d’accord, je viens. Mais pas longtemps. Juste une heure ou deux, pas plus, je n’aime pas trop les fêtes.

Clair, net, précis et sincère, la demoiselle de marbre venait de faire un pas en avant. Et Daidaiiro n'allait certainement pas reculer. Il garda un peu ses mots pour lui, ne sachant que dire et ne s'y attendant pas, avant que la jeune fille ne lui propose de venir la prendre ce soir, à sa chambre. D'accord, il passerait la chercher. Et, bien qu'il ait le permis, ils iraient à pied, étant donné que la discothèque est très proche et que le temps ne leur est pas vraiment compté.
Après tout, elle venait de dire que leur connaissance se conterait en heure, non ?

- Bien sûr ! Je viens à 20h, et on partira... Merci d'accepter, ça me fait plaisir ! avoua-t-il avec le plus lumineux des sourires.

Le lac s'était réchauffé d'un degrés, le bataillon commençait à gagner sa première bataille... Certes, pas la guerre, mais une bataille, c'était déjà beaucoup.